10 bonnes pratiques pour un béton durable

Bétonnage d\'une dalle

Le béton est un matériau avec une riche histoire, de fascinantes propriétés et une apparente simplicité de fabrication qui ont fait de lui un matériau de choix pour les constructeurs. Toutefois derrière la simplicité de ces traits se cache une complexité car Il suffit de quelques litres d’eau en plus dans une gâchée, d’un sable avec beaucoup de fines, ou d’un granulat « sale » pour voir chuter drastiquement sa qualité. La raison est que le béton est un matériau hétérogène. Sa qualité dépend donc d'un grand nombre de facteurs différents. L'ordre d'importance des différentes caractéristiques,  dont l'ensemble assure la qualité du béton, dépend de l'exigence principale qui peut être, par exemple, l'aspect des parements, la résistance aux efforts, la stabilité en présence d'agressions chimiques.  Par conséquent, pour comprendre correctement la qualité d’un béton, on est contraint à une réflexion d'ensemble englobant toutes les caractéristiques concernées.
Afin d’aider le Projeteur dans la préparation et l’exécution de son ouvrage, nous avons recensé 10 bonnes pratiques dont la stricte observance permettra de conférer à vos ouvrages une grande durabilité. Ces règles se rapportent au comportement du béton à l'égard des influences extérieures, notamment des agressions chimiques.

Situation
Étudie soigneusement l'ouvrage  projeté en  ce  qui  concerne  son exposition  aux  intempéries  et aux agressions chimiques  extraordinaires.
 (Gaz  d'échappement,  sels de mers, eaux séléniteuses, acides des graisses, du lait et des fruits, effluents chimiques, etc).

Forme
Essaie de donner à l'ouvrage en béton une forme améliorant encore sa durabilité, avec les tendances suivantes: grosses sections de formes simples, faible proportion d'armature, formes trapues.
(Surface  minimale  par  rapport  au  volume,  facilité  d'accès  au  coffrage, joints de dilatation, de retrait et de reprise).

Détails de construction
Veille  à  prévoir  une couverture de  béton  suffisante  sur  l'armature, une bonne évacuation des eaux et une exécution correcte des joints. Examine les mesures de protection.
(Pour  les   ouvrages   exposés  aux  intempéries, les  prescriptions Ivoiriennes suivent pour l’heure les prescriptions du BAEL 99 ou de l’Eurocode pour la couverture de béton sur l'armature en fonction du préjudice de fissuration et de l’environnement).

Programme
Recherche toutes les possibilités d'améliorer la durabilité du béton par un déroulement harmonieux des travaux et un travail efficace du personnel.
(Choix de fournisseurs, d'ouvriers et de chefs de chantiers consciencieux; déroulement bien réglé des travaux:  prévision des influences climatiques; organisation des contrôles).

Composition
Cherche à obtenir un béton de composition optimale. Si possible avec l'ordre des  priorités suivant  maniabilité – facteur eau/ciment minimum - résistances - coût. Evite d'utiliser des granulats sales et inappropriés.
(Béton  plastique  riche  en  mortier,  peu  enclin à la ségrégation et au retrait, adjuvants,  malaxage de longue durée,  béton transporté  par camion malaxeur).

Mise en œuvre
Programme les travaux de telle façon qu'ils se déroulent régulièrement.  Contrôle  l'étanchéité  et  la  stabilité des coffrages ainsi que la position et la fixité de l'armature.  Conduis le bétonnage de telle façon qu'il ne se produise aucun nid d’abeilles. (Béton régulier, surface fermée, compacité maximale).

Durcissement
Prends toutes mesures propres à éviter des fissures précoces ou des tassements.  Évite les  dégâts  dus  au  décoffrage  et  les  surcharges prématurées.
(Larges fissures, surface rugueuse, délai de décoffrage, ébranlements).

Traitement de cure
Organise un traitement de cure systématique.  Il faut éviter tout dessèchement du béton avant que celui-ci ait atteint une résistance suffisante. La température du béton doit s'adapter lentement, mais régulièrement à celle de l'environnement. Eviter les brusques variations de température,  échauffement   (soleil, tensions, gradient de tension, réduction des tensions).

Garantie de qualité
Contrôle, au moyen d’essais in situ et en laboratoire, les matériaux et le travail en ce qui concerne le maintien de la qualité et la régularité. Prépare à l'avance le programme des contrôles qui doivent être d'autant plus fréquents que l'ouvrage sera soumis à de plus fortes sollicitations.
(Contact avec les fournisseurs, transport, consistance, vibration, résistance, influences climatiques).

Entretien
La durabilité à longue échéance exige naturellement des contrôles périodiques et certains travaux d'entretien. Avant d'entreprendre la réparation de dégâts  éventuels  il  faut  analyser  leur  nature  et  leur cause. Cet examen permet de juger du degré d'urgence de la réparation et d'en estimer le coût.
Il faut distinguer en principe entre deux sortes de dégâts : les dégâts ponctuels qui sont le résultat d'inattentions occasionnelles lors de l'exécution des travaux ou des contrôles, et  les dégâts chroniques qui sont dus  à des erreurs  systématiques du projet, de la composition du béton ou de sa mise en œuvre).


Référence : Bulletin du ciment 1986-1987

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Pour une production locale du clinker

Légende: Chaîne complète de production du ciment.

Dans un de mes articles précédents (pourquoi le prix du ciment reste-t-il élévé?), je faisais remarquer que le prix élevé du ciment en Côte d’ivoire résulte de la nature des usines locales consistant uniquement en des unités de broyage du clinker avec le gypse pour donner le ciment. 
Dans le présent article, je tente une ébauche de solution en mettant en exergue le potentiel dont dispose la Côte d'Ivoire pour une production locale du clinker qui déboucherait sur une baisse du prix du ciment.

Dans la structure de prix du ciment, le coût du clinker détermine à lui seul presque le tiers (1/3) du prix de revient du ciment. Ce caractère décisif du clinker dans le prix du ciment découle de l'importance des ressources qui sont mobilisées pour la production de ce matériau.
Le clinker servant à la production du ciment en Côte d'ivoire est importé. Cette situation rend irrationnel pour les entrepreneurs, l'idée de réduire de réduire le coût du ciment en spéculant sur le clinker. Pour spéculer à la baisse, il leur faudrait pouvoir optimiser le coût de production du clinker grâce à la marge de manœuvre qu'offre toute production par soi-même et pour soi-même.
Produire localement le clinker devient donc une problématique cruciale à résoudre. Du coup, il devient pertinent de se demander: Est-ce possible de créer une industrie complètement locale du ciment ?

Il relève du domaine commun aujourd’hui que pour créer une industrie il faut réunir deux (02) conditions: la matière première et l'énergie. L’industrie cimentière ne déroge pas à la règle.

Chaîne de production du ciment

Le processus de production du ciment peut être scindé en deux étapes principales: la production du clinker et la fabrication du ciment.

  • la production du clinker

Elle se fait par cuisson de matières premières (calcaire, argile, et éventuellement cendres volantes, pouzzolanes etc...) dans de hauts fourneaux à une température comprise entre 1400 et 1500ºC. Ces hautes températures sont atteintes par utilisation de combustibles tels que la houille, le pétrole et ses dérivées, le gaz etc… La consommation calorifique est comprise entre 3.000 et 8.000 Mégajoulej/tonne de clinker. On en déduit que pour produire une (01) tonne de clinker, il faut brûler entre :
    •  90 à 240 kg de charbon;
    • 79 à 210 kg de gaz naturel;
    •  70 à 186 kg de diesel
  • la fabrication du ciment
Dans cette étape, le clinker est co-broyé avec du gypse dans un broyeur rotatif alimenté à l’électricité. On estime qu’une consommation de 70 à 160 kwh d’électricité est nécessaire pour obtenir une (01) tonne de ciment.
On déduit que les facteurs conditionnant une production totalement locale du ciment sont :
    • la présence de gisements de calcaire et d’argile
    • la disponibilité de matières combustibles telles que le pétrole, le charbon ou le gaz
    • la disponibilité de l'énergie électrique
La Côte d’ivoire dispose t-elle de ses ressources?

Matières premières du clinker


Le clinker, principal constituant du ciment, est obtenu à partir d’un mélange de calcaire et d’argile et d’oxyde de fer éventuels.

 Le calcaire est une roche sédimentaire formée à partir de la décomposition de coquillages et de squelettes de micro-algues et animaux marins. De ce fait, on le retrouve principalement dans les zones marines anciennes ou les zones lacustres le long des côtes à des profondeurs comprises entre 0 et 60 m. En Côte d’Ivoire, on a trouvé des dépôts de calcaire le long de la bordure lagunaire entre Fresco et la frontière avec le Ghana, c’est-à-dire le long du bassin sédimentaire ivoirien. Ce calcaire se présente sous forme d’amas coquilliers dénommés faluns. Une étude menée par la SODEMI aurait permis d’estimer les réserves de calcaires côtiers à 310.000 tonnes. Cette quantité semble faible comparativement à ceux exploitées dans les pays producteurs de clinker.
Par contre, on sait également que du calcaire de type industriel a été exploité à Eboco près de la lagune Aby durant la période d’occupation coloniale. De ce fait il n'est pas exclu que de nouvelles prospections menées dans l’ensemble des zones lacustres et avec pour point de départ la ville d’Eboco permettent de découvrir des réserves à potentiel industriel. En tout état de cause, on retiendra que la Côte d’Ivoire dispose d’un potentiel géologique qui doit être mieux étudié en ce qui concerne le calcaire.
Par ailleurs, quand bien même les réserves de calcaire seraient minimes à l’issue des prospections, la proximité géographique avec les territoires possédant de plus grosses réserves tels que le Sénégal ou la RDC facilite l’importation du calcaire pour produire du clinker.

Si le potentiel en calcaire est réel mais les réserves restant à être formellement identifiées, l’argile lui ne fait pas défaut à la Côte d’Ivoire où la présence de l’argile y est historiquement attestée. Ce matériau a servi à l’essor de la micro-industrie potière depuis les temps les plus reculés à nos jours. Encore aujourd’hui, les centres de production traditionnelle de poteries constitués en villages (tels que le village des potiers de Tanou Sakassou, les villages de potiers de Katiola ou encore le fameux village de potières de Montiamo dans l’est du pays) confectionnent et distribuent les poteries de très bonne qualité.
Par ailleurs, les résultats des prospections réalisées par la SODEMI entre 1963 et 1970 ont permis d’identifier d’énormes réserves d’argile qui restent faiblement exploitées :
  • près de Grand-bassam, on a découvert des réserves estimées à 1,7 millions de m3
  • le plateau de Gounioubé situé à 15 km au nord-ouest d’abidjan renferme un gite évalué à 3,4 millions m3
  • l’examen des plateaux du Banco et d’Andokoua a relevé l’existence de réserves avoisinant le million de m3 chacun
On l’aura remarqué, toutes les prospections menées à ce jour se sont limitées à la région d’Abidjan. Or nous sommes persuadés que le nord, le centre et l’est du pays en tant que foyers historiques de production de poterie renferment des dépôts qui n’attendent que d'être découvert.

En somme sur la question des matières premières telles que le calcaire et l’argile, la Côte d’Ivoire dispose d’un potentiel géologique appréciable qui méritent l’attention des industriels locaux. De plus la position géographique du pays et ses ports sont également des atouts non-négligeables qui doivent être mis en valeur.

Potentiel énergétique de la Côte d’Ivoire


Sans énergies il ne peut y avoir d’industries car l'énergie est d’essence vitale à la production d'échelle. En conséquence les industries s’implantent toujours là où il existe une source d'énergie viable. A ce jour, les ressources de la Côte d’Ivoire sont constitués principalement par le pétrole et le gaz naturel. A ceci s’ajoute la biomasse issue de l’exploitation des produits agricoles de rentes.

Bien que les prospections quant à la présence de gisement pétrolier dans le bassin sédimentaire furent concluantes dès la période d’occupation coloniale, l’exploitation pétrolière n’a démarré qu’en 1980. On aujourd’hui estime que 12,4 millions de barils de pétrole ont été produit durant l’année 2017.  L'actuel gouvernement entend lancer des nouveaux chantiers de prospection qui pourraient aboutir à la découverte de nouveaux champs pétroliers et gaziers. Une industrie du clinker serait une cliente idéale de ce pétrole qui servirait à la production rendant ainsi plus dynamique l'économie intérieure.

Vers des combustibles alternatifs


Un indicateur pertinent du rôle clé que jouera la biomasse dans la production en Côte d’Ivoire est donné en les projets de création de centrale de production d'électricité par biomasse.  Faute d'audace entrepreneuriale, la biomasse importante générée par le pré-traitement des cultures de rente ( le cacao, le café, le palmiers à huile etc…) a pendant longtemps été gaspillée. Elle va désormais être valorisée en tant que source d'énergie renouvelable et peut très bien servir à produire la chaleur nécessaire à la clinkérisation. Un tel projet d'usine à clinker chauffée totalement, au mieux, ou en partie, au pire, à la biomasse mettrait l'Afrique et particulièrement la Côte d’Ivoire à l'avant-garde de l'innovation en procédé industriel.

Pour ce qui est de l'énergie électrique, servant principalement à la fabrication du mélange ciment, je m'abstiendrai des détails dans la mesure où les unités de production de ciment sont déjà en pleine installation témoignant qu'un problème de rareté en électricité pour les usines ne se pose pas.

En résumé, la Côte d’Ivoire dispose d'un potentiel avéré pour la production de clinker et du ciment. Ce potentiel se décline en réserves naturelles de matières premières abondantes pour l'argile, réserves à augmenter pour le calcaire, et en ressources énergétiques telles que le pétrole, le gaz, la biomasse. Ces atouts restent à être utilisés au profit de l'économie locale. L'industrie du ciment étant un acteur clé de l'économie moderne basée sur la production, il importe que des entrepreneurs locaux de préférence et le gouvernement s'y intéresse.


Sources et bibliographies:







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