Question foncière ivoirienne


Un collectif de spécialistes mandatés par la Banque Mondiale a rédigé un rapport diagnostic sur le foncier ivoirien. Ce document dit en substance que le recours, par l’Etat, depuis 1998 à aujourd’hui, à des solutions légales partiales a plus complexifié le problème foncier qu’il n’a aidé à le résoudre.

 La question foncière intéresse le praticien de la construction dans la mesure où la sol est notre champ d’action privilégié.

Cet article présente l'état des lieux du foncier ivoirien dressé par le collectif de spécialistes. Il est extrait du rapport complet, intitulé “CADRE D'ANALYSE DE LA GOUVERNANCE FONCIÈRE DE LA CÔTE D'IVOIRE” de Mars 2016. nous partagerons avec vous l’état.

J'espère qu’il vous permettra de mieux comprendre la problématique foncière en Côte d’Ivoire.

Contexte ivoirien


Le foncier représente pour la Côte d'Ivoire un des enjeux majeurs pour la paix sociale, la stabilité et le développement économique, après la grave crise militaro-politique qu'a connu le pays de 2002 à 2010. Il est fortement politisé et structuré autour de la dynamique des relations entre autochtones et immigrants agricoles.

Incohérences légales du foncier rural 


Dans les campagnes rurales, les rapports entre les différentes communautés restent crispées par la remise en cause des transferts fonciers passé, ce qui occasionnent généralement des litiges récurrents au sein des groupes des familles et entre les communautés autochtones et les immigrants.

La loi foncière adopté en 1998 consacre l'exclusion des non-ivoiriens à la propriété foncière, or la très grande majorité des exploitants agricoles dans les zones forestières sont des non-ivoiriens installés depuis plusieurs décennies dont leurs descendants aspirent à être propriétaires des terres acquises par leurs parents.

La loi n°98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural est restée largement inappliquée, plus d'une décennie après sa promulgation. Par exemple, de nombreuses localités du pays ne sont pas encore dotées en organes de gestion foncière (CVGFR, CGFR) et moins d'un millier de certificat foncier ont été délivrés depuis l'application de cette loi ; ce qui représente environ 0,10% des terres rurales à immatriculer.

Par ailleurs, certaines de ses dispositions présentent des contradictions. Le certificat foncier est délivré aux nationaux et aux non-nationaux et la propriété exclusivement aux citoyens ivoiriens (art.1). Pourtant, en son article 4, la loi stipule que pour les terres du domaine coutumier, la preuve de la propriété est établie par le certificat foncier. Ensuite la loi fait obligation de transformer les certificats fonciers (y compris collectif) en titre de propriété dans un délai de 3 ans. Cette disposition rend caduc la valeur juridique des certificats établis et non transformés en titres à ce jour.

Problèmes organisationnels dans le foncier urbain 


Le milieu urbain qui se caractérise par un accroissement rapide de sa population rencontre également de nombreux problèmes de gouvernance foncière.

Les litiges fonciers en zone urbaine sont nombreux et occupent une part significative dans les décisions rendues par les tribunaux. Face à l'extension des villes et à la forte demande en logements, les autorités coutumières au nom de leur droit autochtone procèdent à des lotissements qui ne s'intègrent pas nécessairement dans les schémas directeurs d'urbanisation des villes.

Ces schémas et plans directeurs, lorsqu'ils existent sont devenus obsolètes et méritent d'être actualisés en tenant compte des réalités sociales actuelles.

Entre l'Etat à travers ses structures techniques, les collectivités territoriales et les communautés villageoises détentrices des droits coutumiers, les relations sont parfois ambiguës et conflictuelles. La superposition d'instances et de compétences (publiques, privées, coutumières) mal coordonnées dans l'administration des terres dans un contexte de forte demande conduit à de nombreuses dérives et des litiges.

La promulgation de la loi de juillet 2013, relative à l'acquisition de la propriété des terrains urbains, sensée apporter de la flexibilité dans l'acquisition du titre de propriété (ACD) et l'instauration du guichet unique du foncier et de l'habitat n'ont pas permis de juguler les nombreux problèmes constatés dans ce secteur, à savoir les procédures longues et complexes, la cherté du coût d'établissement des titres de propriété, le chevauchement des compétences entre les institutions publiques compétentes en matière foncière, etc.

Incohérences légales dans le foncier forestier 


Dans le secteur forestier, le code forestier du 14 juillet 2014, au delà des innovations qu'il apporte notamment en reconnaissant et en protégeant les "forêts des communautés rurales" contient des faiblesses qu'il convient de remédier. En pratique, le Code forestier actuel ne permet pas de distinguer par exemple le domaine forestier privé de l’État et celui des personnes privées.

Par ailleurs, il existe une certaine incohérence entre l'article 29 qui confère la propriété des forêts non immatriculées à l’État et l’article 40 qui reconnaît le droit coutumier des communautés sur les forêts, même si celles-ci ne sont pas encore immatriculées.

En conclusion 


La Côte d'Ivoire disposent de plusieurs lois et textes réglementaires sur le foncier rural, urbain, forestier, sur le secteur minier, le pastoralisme, etc. Ces lois et textes s'inscrivent dans des schémas sectoriels de développement économiques. Ils méritent d'être mis en synergie dans le cadre de l'élaboration d'une politique foncière cohérente au service du développement global de la Côte d'Ivoire.
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La route comme effet du progrès



“Si vous souhaitez savoir si une société stagne, si la religion est une formalité morte, vous pouvez apprendre quelque chose en vous rendant dans les universités et les bibliothèques. Quelque chose aussi par le travail qui est fait sur les cathédrales et les églises, ou en leur sein; mais tout autant en regardant les routes. Car s'il y a un mouvement dans la société, la Route, qui est le symbole du mouvement, indiquera le fait.
Lorsqu'il y a une activité ou une ouverture, ou un esprit de liberté de quelque nature que ce soit, il y a alors des rapports et des déplacements, et ceux-ci nécessitent des routes.
Donc, s'il y a un quelconque progrès, si de nouvelles idées sont dehors et de nouveaux espoirs naissent, vous le verrez par les routes qui se construisent. Rien ne fait chemin sans passer par la route. Toute action créative, que ce soit au gouvernement, dans l’industrie, dans la pensée ou dans la religion, crée des routes.”
_ Horace Bushnell (1802 - 1876)

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